samedi 2 juin 2012

Le Strasbourg à Bitche: chef et cuisine, délocalisés

Bitche et son "Bitcherland", une histoire de garnison, de citadelle de Vauban... et de gastronomie exilée.
Lutz Janisch et son épouse Cynthia ont pris d'assaut la demeure au cœur de la bourgade quelque peu sinistrée, un hôtel qui ne paye pas de mine. Il nous vient de l'Est de l'Allemagne et ramène avec lui un goût de nostalgie et d'enfance décalée de notre faste vieille Europe.

Le Strasbourg - Bitche @lrds

Le décor intérieur, sobre, design brun, belles nappes, paravent en osier et chaise baroques beiges, confortables. Ambiance tamisée donc pour démarrer par l'accueil réservé trop discret de notre hôtesse à la fine mèche noire qui semble nous oublier et surtout ne pas nous informer sur le contenu des formules du jour gardées secrètes sur la carte.

Amuse-Bouche - Le Strasbourg - Bitche @lrds

Les amuses-bouche font irruption: tapenade avec fruit de câpres, beurre à la moutarde à l'ancienne avec jambon cru effiloché tendre, éternelle guacamole avec radis, le tout servi sur une barquette. Le crémant très justement frais, le verre de muscat de chez Paul Buecher à Wettolsheim sont de bonne augure.

Foie Gras et asperges - Le Strasbourg - Bitche @lrds

Le menu "Strasbourg" à 47 Euros semble un bon compromis pour faire un tout d'horizon de cette cuisine qui semble osciller entre nord et sud, entre simplicité et extrêmement sophistication: pour preuve le pain maison un peu roboratif et l'entrée de foie gras en millefeuilles, et gelée d'asperges, relevé d'huile de noisette: les contrastes sont rudes et abrupts au palais qui se perd dans un flot de suggestions gustatives. Peut-être y a-t-il encore un parfum de Porto dans ce foie gras trop "rond", cette gelée trop "raide" en bouche? Quelques dés de jambon de porcelet en sus autour de cette architecture de fragrances et un verre de pinot gris réserve personnelle Buecher 2005 à la saveur de noyau d'abricot pour égayer le pain trop sec au torchon.

Gravelax de cabillaud - Le Strasbourg - Bitche @lrds

Deuxième service du menu, le Gravelax de cabillaud ,sorte de brandade avec un coquillages fourré de légumes sur un lit de mousse sucrée de citron. On oscille encore entre le Nord et le Sud sans grande conviction d'identité de goût. La peau du poisson est tendre et savoureuse, la chair, exquise. Avec un Beaujolais blanc domaine Piron 2009.

Amuse-Bouche - Le Strasbourg - Bitche @lrds
Un amuse-bouche fait suite: cappuccino en verrine, crème choux fleur à l'ail: une fois de plus les parfums se catapultent et s'entrechoquent plutôt curieusement: très sucré, caramélisé, très salé, trop prégnant.

Agneau - Le Strasbourg - Bitche @lrds

On passe ensuite à l'agneau, épinards grillés, pignons de pins et polenta crémeuse, bien savoureux dans l'assiette. Belle cuisson pour ces tranches fines, rosées, à point. Avec un Bordeaux rouge 2009 Mademoiselle L Château Lagune, cela passe bien en bouche.

Espuma d'oeuf - Le Strasbourg - Bitche @lrds

Arrive pour distraire les papilles un espuma d'œuf au thym, à l'huile de truffe sur coquetier: cela sent le gaz, preuve qu'il y a de la truffe et c'est couché sur le foin.

Sandre - Le Strasbourg - Bitche @lrds
Quant au sandre en plat à la carte (23 Euros) avec asperges al'dente, noisettes, pommes de terre et beurre blanc, il est un peu trop beurré. Le verre de gewurtz Buecher au gout d'aspérule fera le reste pour rehausser le ton.
Pigeon des Vosges, solette farcie, encore quelques beaux secrets de carte... Tarifés très doux, toujours. Les menus à 25 et 35 Euros semblent des aubaines pour les "petits et moyens budgets".
Le service aimable, masculin est discret et un peu timide.

Délice Rhubarbe Fraise - Le Strasbourg - Bitche @lrds

Côté dessert au menu , le délice de rhubarbe acide, fourrée de mousse de fraise parfaite, feuille de menthe hachée, avec chocolat blanc et crème glacée à la réglisse. La facture du mets est virtuose en façonnage.
Le dôme au chocolat sur crème d'absinthe est un régal...
Un café pour terminer (2 Euros) avec chocolat à la crème de pistache, opéra au caramel et cacahuète et tartelette citron: du bel ouvrage. La boule de glace cacao maison, sauce chocolat, 1,50 Euros.
Cette cuisine déroute, décalée, sans vrai territoire, ni territorialité,comme échouée au pays de Bitche.
Sur le parking de l'Hôtel, une Trabant bleu ciel des années 1970... Cela en dit peut-être plus que bien d'autre chose sur les métissages, mais aussi les dérives du melting pot de la cuisine d'ici et d'ailleurs, ni fusion, ni terroir, ni tradition, ni moléculaire....A la merci d'un souci de perfection, de "trop" qui nuit à la créativité d'un chef, jeune, audacieux mais un peu perdu dans les fragrances de ce vaste monde.
Un voyage un peu "bousculé" et débridé, à la poursuite d'une étoile?

Bon appétit

Le Resto du Samedi


Le Strasbourg
24 rue Teyssier
57230 BITCHE
03 87 96 00 44
le-strasbourg@wanadoo.fr
www.le-strasbourg.fr

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